Souvent, il est dit que la Gendarmerie nationale avait pour prédécesseur la Maréchaussée. Sauf qu’il n’existait pas une seule Maréchaussée, mais plusieurs Maréchaussées, qui formaient ensemble la Maréchaussée de France.
L’évolution des maréchaussées étant constante à travers les siècles, je vous propose ici de vous arrêter sur le XVIIIe siècle et plus particulièrement sur les années 1770. Cela facilite toujours les choses de s’arrêter à un espace-temps défini en histoire.
Rappelons déjà que chaque compagnie de maréchaussée a, à sa tête, un « prévôt général » et que ce prévôt est à la fois un homme de justice et un homme armé. Concrètement, il était chargé d’instruire et de juger les troubles qui le concernaient, sur son territoire donné, en étant assisté par une troupe armée : sa compagnie de maréchaussée, composée de cavaliers.
Dans les années 1770, mais cela depuis un temps fort reculé déjà, la compagnie la plus importante d’entre toutes les compagnies de maréchaussée était la compagnie de la Connétablie, Gendarmerie, Maréchaussée de France, Camps et Armées du Roi. C’était un bien long titre, pour cette « compagnie colonelle », qui avait le premier rang sur les autres compagnies de maréchaussée. Autrefois, elle était chargée de servir de garde à la Connétablie, dirigée par le Connétable. Dans les années 1770, il n’y avait plus de grand office de Connétable ; le titre seul revenait alors de façon honorifique au plus ancien des maréchaux de France. Suite à ces changements, cette compagnie a eu de nouvelles missions : elle était spécifiquement chargée de veiller au « point d’honneur » entre les militaires et les nobles. Elle était sous les ordres directs des maréchaux de France, qui formaient toujours ensemble un tribunal particulier pour juger les affaires liés au point d’honneur dans tout le royaume.
Il existait ensuite des compagnies par zone géographique. La bonne ville de Paris avait la compagnie du lieutenant-criminel de robe-courte. L’Ile-de-France avait une compagnie, appelée compagnies du prévôt général de l’Ile-de-France, composée de 10 brigades spécifiques, notamment armées par des Invalides et des hommes de plus de 20 années de service. C’est cette compagnie qui fut prise en exemple en 1720 pour créer, pour chaque généralité ou province du Royaume de France, une compagnie de maréchaussée, chargée de veiller principalement à la sûreté des grands chemins. Dans les années 1770, il existait ainsi une trentaine de compagnies de maréchaussée sur tout le territoire, en plus de celle de Paris et de l’Ile-de-France. En d’autres termes, tout le territoire du Royaume de France était alors couvert. Et rappelons qu’il ne s’agissait pas alors que des zones rurales, mais également les zones urbaines. Les brigades de maréchaussée étant d’ailleurs toujours fixées à des endroits stratégiques au sein des villes, pour toujours mieux assurer la surveillance et la sûreté des principaux axes de passage.
Toutes ces compagnies « territoriales » de maréchaussée, rattachées depuis 1720 à la Gendarmerie, veillaient donc au bon ordre dans le territoire, en instruisant et jugeant ce qui s’appelaient les cas prévôtaux, c’est-à-dire les crimes ou délits commis par les gens de guerre sur le territoire, mais aussi et surtout les voleurs, vagabonds, gens sans aveu ou sans domicile, ainsi que les vols intervenus sur les grands chemins. Donc mettons ici en avant que le rôle prévôtal n’est pas limité alors à la chose militaire, loin de là.
Pour inspecter l’état des compagnies de la Maréchaussée de France, un département de cinq inspecteurs généraux existait alors. Ils avaient le rang militaire de Mestre de camp.
Il n’existait pas, à proprement parler, de commandant de la Maréchaussée de France. Toutes les compagnies relevaient du Secrétariat d’État à la guerre, sans chef unique intermédiaire.
Par ailleurs, indiquons ici que la maréchaussée des monnaies ne doit pas être confondue avec ces maréchaussées. Il s’agissait alors d’une maréchaussée distincte, liée à la Cour des monnaies. Il ne faut pas non plus croire que les prévôts généraux des maréchaussées étaient prévôt de l’armée ou prévôt de régiment. Ces prévôts étaient distincts et officiaient chacun dans leur armée ou leur régiment. Ainsi est-il important de souligner que la Maréchaussée de France ne se chargeait pas du rôle de prévôt des armées comme on l’entend aujourd’hui.
Pour consulter les cartes des compagnies, lieutenances et brigades de maréchaussée dans les années 1700 (mais aussi à d’autres dates !), rendez-vous sur L’Atlas de la gendarmerie !